Les Mouradites 1613-1705
LES MOURADITES :
a) LES BEYS:
Une charge semblable était déjà en fonction sous la dynastie des Hafsides.
Le Bey devait collecter les impôts en maintenir l'ordre dans l'intérieur du pays au nom du Dey. Pour ce faire il commandait un corps d'armée, et recevait du Dey un pouvoir de justice.
La visite du Bey pour collecter les impôts dans la régence se faisait deux fois par an : une visite en hiver dans les territoires du sud et une en été dans la partie nord du pays.
Ces expéditions militaires (Mahalas) étaient pour le Bey l'occasion de rencontrer les dignitaires locaux, les chefs de tribus et de lier des liens d'amitiés voire de clientélisme qui pouvaient être utiles pour les plus ambitieux…
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ROMDHAN BEY: 1591-1613
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MOURAD BEY: 1613-1631
Ancien esclave de Romdham Bey (d'origine Corse il avait été capturé par les corsaires Tunisiens à l'âge de neuf ans).
il est le fondateur de la dynastie Mouradite. Nommé Pacha est 1631, avant sa mort la même année, en accord avec le Dey régnant Yûsuf Dey, il transmet le pouvoir à son fils Hammouda
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HAMMOUDA BEY dit HAMMOUDA PACHA: 1631-1662 (mort en 1666)
C'est lui qui saura s'affranchir du pouvoir des Deys auquel les Bey étaient subordonnés. Cette rupture se fera dans le calme et progressivement elle commencera à la mort de Yûsuf Dey et sera consommé lors de l'élection de Uzun Ahmad.
Il affirme sa souveraineté en construisant dans la capitale, privilège des Deys auparavant. Reconstruction du minaret de la grande Mosquée en 1653, puis en 1656, il entreprend de faire bâtir une mosquée près de la mosquée que Yûsef Dey avait édifiée en 1615. On peut lire dans l'architecture du bâtiment une réplique à l'œuvre de Yûsef Dey, une affirmation du pouvoir nouvellement acquis.
Fort de la montée de son pouvoir sur le Deylicat, il quitte le palais des Banû Khorâssân dans le sud de la Médina, qui était le lieu de résidence dans la capitale pour les Beys, et se rapproche du centre du pouvoir, en faisant bâtir au pied de la Kasbah un palais destiné à abriter ses services administratifs et sa résidence: le dar el Bey.
Il reconstruit le maristan (hôpital) hafside du prince Abû Fâris 'Abd al-'Aziz situé dans le souk du cuivre, il entreprend de grands travaux d'adduction d'eau, et œuvre pour que le diwan ordonne la construction de fondouks (caravnasérails) près de bab el-barh. 1660
Pacha en 1658 Il se retire en 1662-1663 et répartit son pouvoir entre ses trois fils :
Mourad l'aîné prend le titre de Bey.
Muhammad el-Hafsi devient gouverneur de Kairouan, Sousse, Monastir, et Sfax.
Hassan le plus jeune prend le gouvernement des territoires du Nord-ouest.
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MOURAD II BEY: 1662-1675
Il laisse trois fils:
Muhammad,
Ali
Ramadân
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MUHAMMAD AGHA BEY : Fils aîné de Mourad II Bey
Reconnu par le Diwan comme Bey le 17 août 1675 contestation d'Ali
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MOHAMMED AL HAFSI : Frère de Mourad II Bey
Le Diwan le nomme Bey le 15 octobre 1675, mais le fils aîné de Mourad exil son oncle à Istanbul et reprend son poste le 16 décembre 1675
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ALI BEY : Fils de Mourad II Bey
Contestant la nomination de son frère au poste de Bey, Ali le provoque et lui livre bataille à Kairouan le 13 février 1677 et remporte la victoire. Il se fait reconnaître comme le Bey légitime
En février 1678 Muhammad Agha Bey prend la tête d'un soulèvement populaire et met le feu aux portes de la ville. Le 16 octobre de la même année, Mohammed el-Hafsi rentre d'exil avec le titre de Pacha et une flotte fournie par le Sultan Ottoman. Il fait alliance avec Muhammad Agha Bey contre Ali. Le Beylerbey d'Alger offre sa médiation et les partis rivales concluent un accord le 10 décembre 1679 selon lequel Ali prend le titre de Bey , Muhammad el-Hafsi sera Pacha comme le souhaite Istanbul, et Muhammad Agha Bey reçoit le gouvernement de Kairouan. Pour preuve d'engagement Muhammad Bey doit laisser son fils en otage entre les mains d'Ali Bey. Au début de 1680 Muhammad el Hasfi Pacha fomente un complot contre le Dey en poste, Tâbâq Dey, Il est condamné à l'exil, se réfugie à Istanbul ou il meurt en 1686.
Les deux frères reprirent rapidement la lutte, le 16 avril 1682 le fils de Muhammad est mis à mort. Les batailles fratricides se succèdent sans qu'un des deux protagonistes l'emportent de façon décisive. Le Dey en place, Ahmad Shalbî affermit son pouvoir et nomme au Beylikat son propre candidat en la personne de son mameluk, Muhammad Manyût. Face au risque de perdre tous deux la régence les deux frères signent une trêve et demande au Dey d'Alger Ibrahim Khûja son aide. L'armée Algérienne s'unie aux armées de Muhammad et de Ali en août 1685 et assiège Tunis. Après de longs mois de siège la ville tombe fin mai 1686, Ahmad Shalabî s'enfuit. Le 24 juin la ville est pillée, le 25 le Dey d'Alger convoque un conseil au cours duquel Ali Bey est assassiné ; Le 26 Ahmad Shalabî est étranglé. Le Dey d'Alger Ibrahim Khûja confirme Muhammad Agha Bey à son poste de Bey selon la volonté de la Sublime Porte. Le Dey d'Alger regagne sa régence après avoir reçu un confortable dédommagement pour sa peine.
En juillet 1694 LE Dey d'Alger, Sha'bân attaque la Tunisie est prend Tunis le 12 novembre. Muhammad Agha Bey doit prendre la fiute. Sha'ban place au Beylikat Muhammad Bin Shukr et au Deylikat Muhammad Tâtâr, puis se retire. Dès janvier 1697 la population excédée par les exactions du nouveau gouvernement rappelle Muhammad Agha Bey, il rendre dans Tunis début mai acclamé par le peuple, Muhammad Tâtar s'enferme dans la Kasbha qui est assiégée, il capitule le 25 juin 1696, la populace le massacre et traîne son corps à travers la ville.
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MUHAMMAD AGHA BEY: 1686-1996
Après sa lutte acharnée pour le pouvoir, débarrassé des obstacles, il redresse le pays.
Il marque son allégeance à l'empire Ottoman en faisant édifier une mosquée de style Ottoman selon le model de la mosquée Yeni Djami d'Istanbul. Elle prendra le nom de mosquée de Sidi Mahrez. Il fait édifier trois souks dont le nouveau souk des chéchias. Se préoccupa des problèmes d'alimentation en eau de la capitale, fit édifier en 1690 un pont barrage sur le fleuve Medjerda à Téburba.
Il s'éteint le 14 octobre 1696, laissant deux fils, Hasan et Mûrad trop jeunes pour lui succéder. C'est donc Ramadân, troisième fils de Mourad II Bey, frère de Mohammad Agha Bey, qui s'était tenu à l'écart du pouvoir, qui est investie de la charge de Bey.
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RAMADAN BEY: 1696-1699
Préférant les plaisirs de la vie à ceux du pouvoir, il laisse l'exercice du pouvoir à un de ses esclaves, Mazhûd. Un de ses neveux, Murâd, fils d'Ali Bey, complotait contre le pouvoir en place, il demande que l'on crève les yeux. Le prince en réchappe, s'enfuit, et lève la population à sa cause contre Ramadan Bey. Le Bey est éliminé et Murâd se fait nommer Bey le 13 mars 1699 à 18 ans, sous le nom de Murâd III
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MOURAD III BEY: 1699-1702
Sanguinaire, dément, (son surnom était : bû-bâla l'homme au sabre) il rêvait de venger l'honneur de sa lignée mis à mal par les princes Algériens, lors de leurs interventions sur les terres de la régence. En 1701 il part à la tête de son armée, entre en Algérie, et met le siège devant Constantine. Il rentre à Tunis en octobre sans avoir réussit dans son entreprise. Au printemps suivant, lors de la levée des impôts dans le nord, il décide de réitérer son entreprise contre la régence d'Alger. L'agha Ibrâhim Sharîf peut être sur ordre du Sultan d'Istanbul, assassine le Bey Murad III le 2 ou le 9 juin 1702, puis il fait exécuter tous les membres de la lignée Mouradite, les deux fils de Muhammad Agha Bey, le petit fils de Hammûda Pacha et son fils âgé de quatre ans. Ce fût la fin de la dynastie des Mouradites.
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IBRAHIM AL-SHARIF BEY: 1702-1705
Il exerçât à la fois les fonctions de Bey de Dey et de Pacha. En 1705 l'armée Algérienne envahie la régence et fait prisonnier le Bey le 10 juillet 1705. C'est Husayn ben 'Ali qui est mis à la tête du Beylikat, et qui saura fédérer les énergies et le patriotisme pour chasser les Algériens.
b) LES DEYS:
L'organisation du pouvoir, à l'origine de la régence était pyramidale : Au sommet, le Pacha, nomé pour trois ans, représentant du Sultan d'Istanbul avec pour l'assister, le Diwan sorte de conseil du gouvernement qui était composé de 12 représentants des hommes (oda-bâchî)de la milice (jund) laissée en place par Sinan Pacha et de 24 de leurs officiers (bulûk-bâchî), et le Dey qui avait le main haute sur la capitale, c'est lui qui commande le Jund, qui est le chef des armées, c'est un gouverneur général de la régence.
Rapidement, le pouvoir du Pacha se trouva réduit à une simple représentativité de la Sublime Porte, il annonce la prière du vendredi au nom du sultan et préside au paiement de la solde des militaires.
La justice était aux mains du Qâdi, personnage envoyé par Istanbul.
Après une révolte de la troupe contre leurs officiers en 1591, C'est ce conseil que les Deys et les Beys attendaient leurs nominations, jusqu'à l'émergence de personnalités qui sauront passer outre et s'imposeront. Le Diwan deviendra alors une simple chambre d'enregistrement. C'est à partir de cette époque qu'apparaît le Bey, aux ordres du Dey, chargé de la collecte des impôts dans la régence, et le représenter à l'intérieur du pays.
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IBRAHIM DEY : 1591-1593
Démissionne en 1593
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MOUSSA DEY : 1593
Renonce à sa charge un an après son élection face à l'indiscipline de la milice de Tunis « le Jund »
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UTHMAN DEY : 1593-1610
Il saura évincer le Pacha, le cantonnant à un rôle purement honorifique. C'est en 1598 qu'il devient le premier Dey à gouverner seul nous dit Ibn Abi Dînar
Il accueillera les Morisques chassés d'Espagne.
Autoritaire et impitoyable, ce prince règnera par la terreur.
Ses contemporains, en témoignent : Ibn Abi Dinar : « C'était un homme capable et courageux » Savary de Brève le décrit en 1609 comme « un homme de taille moyenne, gros et robuste, de contenance fière et arrogante à merveille, ayant l'œil furieux et qui ne regarde jamais en face, le visage plein et rond, portant le menton gras et la moustache grande, comme tous les janissaires de Barbarie… »
J. Pignon nous apprend qu'il possédait une fortune considérable et une flotte bien armée, et Foulque précise : « Il est riche de plus de six millions…il a sept cents esclaves à lui seul…, 2 galères bien armées…, six grands vaisseaux …, et deux pataches »Il repose dans la Zaouïa de Sidi ben Arrous à coté de sa petite fille Aziza Othmâna.
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YUSSUF DEY : 1610-1635
Il avait épousé la fille d'Uthman Dey. Le Dey Uthman, sût "convaincre" le Diwan de le nommer comme son successeur. Secondé efficacement par Mûrad Bey. Ce fut un grand bâtisseur. En 1615 il dote la capitale d'une mosquée qui porte aujourd'hui son nom, et qui échappe au schéma conventionnel des mosquées Malékites. Conformément au rite Musulman en vigueur dans l'empire Ottoman cette mosquée est la marque du rite Hanéfite.
(Il est à noter que l'Europe à cette époque est en pleine renaissance.) Il fonde une Madrasa (école), bâtit des souks dont les revenus serviront à l'entretient des édifices et des fondations religieux.
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USTA MOURAD DEY: 1637-1640
Ancien Chrétien, convertis à l'Islam, d'origine Italienne, son élection au poste de Dey par le diwan nécessita une grande lutte d'influence. Il était Ra'îs général des galères de 1615 à 1637 et faisait partie de l'entourage de Yûsuf Dey.
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UZUN AHMAD DEY: 1640-1647
Officier Turc élu à l'unanimité par le Diwan, en réaction aux origines étrangères de son prédécesseur.
C'est à partir de cette époque que le pouvoir des Deys va se trouver supplanté par celui des Deys. Hammouda Bey, le future Hammouda Pacha est en charge du titre de Bey depuis neuf ans, il restera encore 26 ans au pouvoir, sa personnalité et les pouvoirs politiques et économiques que les Beys ont acquis depuis 50 ans, lui permettent de s'affranchir de la tutelle des Deys.
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MUHAMMAD LAZ DEY: 1647-1653
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MUSTAFA LAZ DEY: 1653-1665
Il recevra de la part de Hammouda Pacha, comme épouse une de ses esclaves, dotée par le Bey comme si elle avait été sa propre fille.
Entre 1666 et 1686 pas moins de 10 Deys furent déposés. Parmi ceux-ci :
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MUSTAFA QARA KUZ DEY: 1665-1666
Sera déposé par Murad II en raison de ses efforts pour rétablir les pouvoirs du Dey. A sa suite entre 1666 et 1668 neuf autres Deys seront révoqués.
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SHA'BAN KHOUJA DEY: 1669-1672
Complota contre Murad II Bey qui le déposera et nommera directement passant outre les prérogatives de diwan :
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MOUHAMMAD MANTASHALI DEY: 1672
En mars 1673, il sera déposé en l'absence de Murad Bey partit collecter les impôts dans le sud, par un groupe de comploteurs à la solde de Ali Pacha qui feront reconnaître Al Hajj Ali Dey et nommeront comme Bey Muhammad Agha en lieu et place de Murad II Bey.
Le Bey légitime reprendra le contrôle de la situation matera la guerre civile le 2 juin 1673 et placera au poste de Dey, Al Hajj Ali Laz :
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AL HAJJ ALI LAZ DEY: 1673
Mis en place en mars 1673 par les comploteurs à la solde d'Ali Pacha.
En juin de la même année Mûrad II reprend son trône et exil Ali Laz Dey à Hammamet.
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AL HAJJ MAMI JAMAL DEY: 1673
Elu sur ordre de Mûrad II, lorsqu'il reprit le pouvoir le 2 juin 1673 après le coup d'état manqué de Ali Pacha en mars 1673.
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PUZOUN AHMAD DEY: 2 jours
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4 DEYS en 1677
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MOUHAMMAD TABAQ DEY: 1677-1682
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AHMAD SHALABE DEY: 1682-1686
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BAQTASH DEY: 1686-1688
Nommé par Muhammad Agha Bey, Il meurt paisiblement dans son lit
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ALI RA'IS DEY: 1688-1694
Sera soumis au Bey régnant Muhammad Agha
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SHA'BAN DEY: 1694
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MAHMOUD KHOUJA DEY: 13 jours en 1694
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MOUHAMMAD TATAR DEY: 1694-1695
Mis au poste de dey par le dissident Muhammad bin Shukr et le Dey d'Alger Sha'bân. Son impopularité lui valu une fin atroce.
Ibrahim al-Sharif Bey, qui mit fin aux errements de Murad III et décima les héritiers de la dynastie Mouradite cumula les fonctions de Bey, de Dey et de Pacha……